Les éditions Perrin publient trois biographies essentielles qui illustrent l’histoire et l’époque où ces hommes ont vécu. Indispensable pour comprendre leur siècle.
Josette Elayi, Nabuchodonosor. Roi de Babylone, entre histoire et légende, Perrin biographie, 2025, 22€
Dans cet ouvrage, l’historienne et assyriologue Josette Elayi s’attaque à une figure majeure de l’Antiquité : Nabuchodonosor II (r. 605-562, av. J.-C.), souverain emblématique de Babylone, dont la mémoire oscille entre grandeur historique et diabolisation biblique. À travers une approche rigoureuse, l’auteur confronte les sources historiques et les récits légendaires pour restituer un portrait nuancé de ce roi qui marqua son époque.
Elayi s’appuie sur des données archéologiques, des inscriptions cunéiformes et des sources grecques pour analyser la politique intérieure et extérieure du monarque. Elle met en lumière son rôle dans la construction de la splendeur babylonienne, notamment les célèbres jardins suspendus et les murailles de la cité. Sur le plan militaire, elle retrace ses campagnes, dont la destruction de Jérusalem en 586 av. J.-C., un événement central dans la mémoire biblique, qui contribua à sa réputation de tyran.
L’ouvrage déconstruit les stéréotypes véhiculés par la tradition judéo-chrétienne, où Nabuchodonosor apparaît comme un instrument de la colère divine, et par la vision occidentale moderne, souvent influencée par ces récits. Sans nier les violences de son règne, Elayi replace ses actions dans le contexte des pratiques impériales du Proche-Orient antique.
Accessible et bien documenté, ce livre s’adresse autant aux passionnés d’histoire qu’aux lecteurs curieux de mieux comprendre les enjeux historiques et culturels autour d’une figure longtemps déformée par le prisme des mythes.
François Gautier, Indira Gandhi, mère de l’Inde, Perrin, 2025, 23€.
Dans cette biographie consacrée à Indira Gandhi (1917-1984), François Gautier retrace le parcours fascinant et contrasté de la première femme à avoir dirigé l’Inde. Héritière du puissant clan Nehru, elle devient Premier ministre en 1966 et marque l’histoire de son pays par sa poigne, ses réformes et ses décisions parfois controversées.
L’ouvrage met en lumière son ascension politique, d’abord dans l’ombre de son père, Jawaharlal Nehru, avant qu’elle n’affirme son autorité avec des mesures décisives, comme la nationalisation des banques, la réforme agraire ou encore la guerre contre le Pakistan en 1971, qui aboutit à la création du Bangladesh. L’auteur explore également la face plus sombre de son règne, notamment l’état d’urgence qu’elle instaure en 1975, une période de dérives autoritaires marquée par la censure et la répression.
Gautier s’efforce de brosser un portrait équilibré, loin des visions simplistes. Il montre une dirigeante tiraillée entre modernisation et centralisation du pouvoir, profondément attachée à l’unité de l’Inde, mais parfois prête à des mesures extrêmes pour y parvenir. Son assassinat en 1984 par ses propres gardes sikhs, en réaction à l’assaut du Temple d’Or d’Amritsar, conclut tragiquement une trajectoire hors du commun.
Clair et bien documenté, ce livre offre une lecture accessible aussi bien aux amateurs d’histoire qu’à ceux cherchant à comprendre les défis politiques et sociaux de l’Inde contemporaine à travers la figure d’Indira Gandhi.
Frédéric Saenen, Léon Degrelle, Perrin, 2025, 24€.
Dans cette biographie, Frédéric Saenen s’attelle à l’étude de Léon Degrelle (1906-1994), figure sulfureuse du XXe siècle, fondateur du mouvement rexiste en Belgique et collaborateur notoire du régime nazi. À travers une analyse documentée et distanciée, l’auteur retrace le parcours de cet agitateur politique, tour à tour pamphlétaire, chef de parti, militaire engagé sur le front de l’Est, puis fugitif en exil.
Le livre revient sur la genèse du rexisme, mouvement catholique et autoritaire qui connut une ascension fulgurante dans les années 1930 avant de basculer dans la collaboration avec l’Allemagne nazie. Saenen décortique les ambitions de Degrelle, son idéologie, ainsi que son engagement dans la Waffen-SS, où il participa aux combats sur le front de l’Est, devenant l’un des rares étrangers décorés par Hitler lui-même. L’ouvrage s’attarde également sur son exil en Espagne franquiste après la Seconde Guerre mondiale, où il passa près de cinquante ans à défendre et réécrire son propre rôle historique.
Loin de toute complaisance, Saenen adopte une approche critique et rigoureuse, s’appuyant sur des sources variées pour démonter les mythes entretenus par Degrelle lui-même. Cette biographie s’inscrit ainsi dans une démarche de démystification, essentielle pour comprendre l’itinéraire de cet homme qui incarna l’un des visages les plus controversés de la collaboration en Europe.
Un ouvrage indispensable pour qui s’intéresse à l’histoire du fascisme en Belgique, à la collaboration européenne sous le IIIe Reich et aux stratégies de réhabilitation post-guerre.