Les taxis volants sont à l’essai en Chine où plusieurs entreprises testent leurs futurs modèles. Les États-Unis ne sont pas en reste. Cette technologie devrait se développer au cours des prochaines années.
Article paru dans le no56 – Trump renverse la table
Le succès mondial des véhicules électriques en Chine a aiguisé l’appétit de ses planificateurs industriels pour des paris audacieux sur de nouveaux types de transport personnel. Sous la bannière de ce qu’il appelle l’« économie de basse altitude », le gouvernement chinois encourage les entreprises et les autorités locales à développer de nouveaux produits et services dans le domaine du transport aérien. La « voiture volante » imaginée depuis longtemps par les futurologues fait partie de ces produits, bien qu’il faille encore attendre de nombreuses années avant qu’elle ne soit utilisée dans le monde réel.
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Une catégorie émergente d’aéronefs à décollage et atterrissage verticaux électriques (eVTOL), dont la plupart ressemblent à un drone de grande taille et à un petit hélicoptère, est beaucoup plus proche d’une utilisation dans le monde réel. Ces véhicules peuvent offrir certains des mêmes déplacements pratiques de point à point et à la demande que les automobiles, car ils n’ont pas besoin de longues pistes d’atterrissage. Compte tenu de son leadership en matière de technologie des batteries et de chaînes d’approvisionnement, la Chine dispose d’une base technique solide pour développer des avions eVTOL. Et ses gouvernements locaux, friands d’infrastructures, sont prêts à subventionner les services eVTOL dans l’espoir de créer de nouveaux moteurs de croissance économique locale. Il ne faudra sans doute pas attendre longtemps avant de voir des taxis aériens électriques dans le ciel des grandes villes chinoises.
Un ciel nimbé de taxis
L’approbation officielle de la nouvelle génération de transport aérien a commencé en décembre 2023, lorsque la conférence centrale sur le travail économique a officiellement désigné l’« économie de basse altitude » comme l’une des « industries stratégiques émergentes » favorisées par la politique gouvernementale. Cette désignation a été rapidement suivie d’un plan industriel national plus détaillé pour les équipements aéronautiques, y compris l’eVTOL, les drones et les voitures volantes, ainsi que des plans de soutien de presque toutes les provinces chinoises, et de la création d’un nouveau département au sein de la Commission nationale du développement et de la réforme pour assurer la coordination.
La définition habituelle de la basse altitude se situe entre 1 000 et 3 000 mètres au-dessus du sol (AGL), soit bien en deçà du rayon d’action habituel des avions commerciaux. L’espace aérien est étroitement contrôlé en Chine, l’armée ayant normalement un droit de préemption sur l’aviation civile. Il est donc significatif que les autorités aient été disposées à assouplir ces contrôles réglementaires, en créant de nouvelles catégories d’espace aérien au-dessous de 300 mètres AGL qui exemptent les aéronefs civils de l’approbation préalable de l’armée, et en déléguant la gestion aux gouvernements locaux. Cette ouverture réglementaire permet une plus grande activité dans la partie inférieure du ciel, comme les services de livraison par drone, les taxis aériens, les vols récréatifs privés et les services d’urgence.
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Cette faveur officielle a contribué à catalyser une vague d’activités au cours de l’année écoulée. Au moins une douzaine de villes chinoises, dont Suzhou, Wuxi, Pékin, Guangzhou, Wuhan et Chengdu, ont créé des fonds publics pour investir dans des entreprises liées à l’économie de basse altitude. Ces fonds publics et d’autres investisseurs ont réalisé d’importants investissements privés dans au moins neuf fabriacants d’eVTOL en 2024, y compris des start-up telles que Volant et AutoFlight, et des entreprises dérivées de constructeurs automobiles comme Aerofugia de Geely et AeroHT de XPeng. La première entreprise nationale à avoir un avion eVTOL de passagers entièrement certifié par les autorités de réglementation, EHang, est déjà cotée au Nasdaq.
EHang livre actuellement un petit nombre d’appareils à ses clients, tandis qu’AutoFlight, Aerofugia et XPeng AeroHT espèrent produire et livrer en masse leurs avions eVTOL pour passagers d’ici à 2026. Plusieurs de ces entreprises ont présenté leurs modèles au public en 2024, ce qui a contribué à stimuler l’intérêt et l’enthousiasme du public.
Les Américains s’y mettent aussi
Les principales entreprises américaines spécialisées dans les eVTOL, Joby Aviation et Archer Aviation, sont également en train d’obtenir les certifications requises et de se préparer à des livraisons commerciales d’ici un an ou deux. Les entreprises chinoises pensent que les entreprises américaines ont encore une avance technologique pour l’instant, mais elles sont convaincues qu’elles peuvent rattraper leur retard et renforcer leur avantage. La technologie des avions eVTOL est étroitement liée à des produits dont la Chine domine déjà la fabrication au niveau mondial : les drones, les batteries et les véhicules électriques. S’appuyer sur ces chaînes d’approvisionnement et ces techniques existantes devrait permettre aux fabricants chinois d’eVTOL de passer à l’échelle supérieure, d’améliorer leurs produits et de réduire les coûts.
La durée de vie des batteries est l’un des principaux goulets d’étranglement actuels pour les eVTOL, car les besoins en énergie pour le vol sont beaucoup plus importants que pour les véhicules terrestres. L’utilisation de batteries plus grandes pour augmenter la capacité peut être vouée à l’échec, car cela ne fait qu’augmenter le poids de l’aéronef et nécessite encore plus d’énergie pour décoller. Les modèles actuels d’EHang ne peuvent voler qu’environ vingt minutes. Mais lors d’un vol d’essai en novembre 2024, alimenté par une nouvelle batterie à semi-conducteurs fournie par CATL, EHang a réussi à prolonger la durée du vol jusqu’à quarante-huit minutes.
Les grands projets des collectivités locales
Les applications potentielles les plus évidentes de ces vols à courte distance sont les services de taxis aériens, et c’est là que se concentrent désormais les efforts des fabricants et de leurs sponsors locaux. La société de tourisme héliporté de Shenzhen, Heli-Eastern, par exemple, souhaite créer une ligne de taxis aériens pour faire la navette entre Shenzhen, à l’est du delta de la rivière des Perles, et Zhuhai, à l’ouest : un vol de démonstration effectué en 2024 n’a pris que vingt minutes pour traverser la baie, contre plus de deux heures pour en faire le tour en voiture.
Selon EHang, des villes comme Shenzhen, Guangzhou, Hefei et Zhuhai proposent de subventionner les services de taxis aériens à hauteur de 100 à 300 RMB par personne et par vol. EHang coopère étroitement avec le gouvernement de Hefei, dans la province de l’Anhui, qui a créé un centre de mobilité aérienne urbaine dans son parc central de Luogang avec un vertiport, un nom fantaisiste pour un site d’atterrissage conçu pour être utilisé par des engins eVTOL.
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Néanmoins, il faudra peut-être un certain temps pour répondre aux préoccupations en matière de fiabilité et de sécurité avant que ces taxis volants ne soient acceptés par le public. Les avions eVTOL étant très récents, personne n’a l’expérience de leur exploitation pendant des périodes prolongées dans des conditions très diverses. Il y aura inévitablement des questions sur la manière d’assurer la sécurité des passagers en cas de panne de moteur ou d’incendie de la batterie, ou par mauvais temps. Ces considérations expliquent en partie pourquoi, malgré de nombreux vols de démonstration, les services utilisant des avions eVTOL n’ont pas encore commencé leur exploitation commerciale.
Cette situation pourrait commencer à changer dans un avenir proche. L’entreprise américaine Archer Aviation espère lancer ses services de taxi aérien eVTOL à Abou Dhabi dès la fin de 2025, tandis que Joby Aviation envisage également de lancer ses services de taxi aérien à Dubaï. De nouveaux oiseaux vont-ils apparaître dans les cieux du monde ?
