Chemins de France : la distillerie de Paris

7 novembre 2021

Temps de lecture : 4 minutes
Photo : Chemins de France : la distillerie de Paris Crédit photo : distillerie de Paris
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Chemins de France : la distillerie de Paris

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Ils sont  nombreux ceux qui peuvent chanter « Je suis né dans le Faubourg Saint-Denis[1] », mais personne ne peut le dire comme la distillerie Julhès. Installée au cœur de ce faubourg elle a été conçue pour l’Art de Paris.

 

Il était une fois deux frères épiciers de Paris, Sébastien et Nicolas Julhès, qui non content de vendre des spiritueux dans leurs boutiques décident de créer leurs propres produits. L’alcool étant une des boissons les plus surveillées et contrôlées de France, c’est à un saut d’obstacles juridiques qu’ils se confrontent pour pouvoir installer leur alambic dans l’arrière-cour de l’une de leur épicerie. La première distillerie de Paris voit ainsi le jour en 2015, sous la houlette de Nicolas, féru de whisky et de spiritueux, qui travaille dans ce secteur depuis de nombreuses années.

Les frères Julhès. Crédit photo : distillerie de Paris

Le nom de Paris ne désigne pas uniquement un lieu mais aussi un esprit. Être une distillerie de Paris signifie capter l’air et les mouvements de la capitale, s’ancrer dans un terroir et rester ouvert aux nombreuses influences extérieures. Les spiritueux produits sont à l’image de Paris, ville où le monde entier se croise, ville de rencontre des arts et de l’excellence. Son art à lui est authentique, unique dans la Ville Lumière. Il veut mettre en relation ses créations avec les autres artisans, cuisiniers, chocolatiers, et métiers de bouche.

Le laboratoire d’art

C’est au fond de la cour qu’est installé l’alambic, permettant la distillation de spiritueux issus de grains, de fruits ou de fleurs : whisky, gin, eau-de-vie.

Derrière les tuyaux par lesquels se déverse le précieux liquide, l’alambic en cuivre occupe l’espace. L’alambic de gaucheest spécialisé dans la double distillation, utilisée notamment pour le whisky. Le deuxième alambic s’élance au plafond comme un grand cheminée pour alléger l’alcool. Plus le passage de l’alcool est complexe, moins il peut emporter d’éléments avec lui, ce qui permet de le rendre léger. À l’inverse, en facilitant son passage, l’alcool chargé en éléments sera puissant. Si l’alambic est le même, il permet de créer de très nombreux produits, alcools, eau-de-vie et même parfums. A chaque fois, tout est art de la distillation, de la maitrise du temps, de la chaleur et des arômes en suspens.

Les deux alambics de la distillerie. Crédit photo : distillerie de Paris

La distillerie Julhès est née pour créer. Nicolas ne recule devant aucune recette, soit-elle d’une étonnante originalité. De multiples alcools perlent de l’alambic maîtrisé par notre alchimiste : whisky, gin, vodka, rhum, eau-de-vie au miel ou à l’érable. Son art est de rechercher la pureté de la composition dénuée de mélanges commerciaux. Le whisky est une science de l’exactitude. Le malt, de l’orge germé et grillé, est mixé à de l’eau chaude dans une cuve spéciale, le Mash Tun, et devient un liquide sucré qui est filtré. Le filtrat est versé dans une cuve où l’on verse de la levure pour enclencher la fermentation qui dure quarante-huit heures. Le whisky de malt est ensuite distillé au moins deux fois. La première distillation, par une chauffe à 95°C, obtient un produit appelé Low wines qui est distillé une deuxième fois. L’art du distillateur se voit surtout à cette étape de la « coupe ». Les premiers litres d’alcool appelés « têtes » sont trop riches en éthanol, et les derniers sont huileux et trop lourds en éléments. Il s’agit de prélever le cœur de chauffe au moment choisi pour obtenir un whisky fruité, floral, vif. Le whisky est ensuite vieilli en fût de chêne. Aujourd’hui, beaucoup de distilleries vieillissent leur production en fûts déjà utilisés, pour le sherry par exemple, moins onéreux et qui ajoute une touche très fruitée en bouche. Nicolas Julhès est quant à lui attaché à la pureté du chêne ancestral pour conserver tout le caractère personnel et pur de sa création. Les whiskies vieillissent ainsi dans des fûts neufs situés dans la cave du bâtiment.

Les fûts en chêne de la distillerie. Crédit photo : distillerie de Paris

Au fond de l’alambic

On se croirait au fond de l’alambic, dans la boutique dessinée par le japonais Shinichiro Ogata. L’ordre soigné qui règne autour d’un majestueux comptoir en cuivre n’est pas sans rappeler la précision d’une composition de whisky. À partir de ses alcools, la distillerie produit même des parfums bien réussis. On peut y découvrir une large gamme de créations originales comme la « népita », une eau-de-vie faite avec de la népita, une fleur corse. La sensation poivrée et légèrement piquante surprend les sens. On ressent également le fort caractère du créateur dans les gins aux tons gustatifs très différents. Tous ces alcools sont vendus à travers le monde où, de Tokyo à Los Angeles, les connaisseurs dégustent ces œuvres très personnelles.

L’unique distillerie de Paris est une histoire fabuleuse de création au carrefour du monde et des arts. Les frères Julhès ont su donner à la Ville Lumière un nouvel argument artistique.

 

[1] Chanson composée par René Sylviano et chantée en 1929 par Mistinguett.

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