Géostratégie, espionnage, Henri IV, Seconde Guerre mondiale, sécularisation. Aperçu des livres de la semaine.
Géostratégie
Philippe Boulanger, Introduction à la géostratégie, La Découverte, 11€.
La géographie est pour tous les stratèges et les stratégistes un savoir incontournable qui s’élabore à partir de l’époque moderne en Europe. Pour le décideur politico-militaire, elle se décline en plusieurs branches : la géotactique (échelle locale), la géographie opérationnelle à l’échelle du théâtre des opérations, la géostratégie à l’échelle des grands espaces.
Contrairement à la géopolitique, la géostratégie, science au service de l’art militaire, a ses caractéristiques propres. L’approche géographique est étroitement liée à l’activité militaire depuis les origines des guerres. Ses composants, qu’ils soient physiques ou humains, influencent d’une manière ou d’une autre la conception de la stratégie. La géographie stratégique, qu’on appelle géostratégie à partir du XIXe siècle, devient alors une spécialité de la science militaire pour l’aide à la décision.
À partir d’exemples passés et actuels, cet ouvrage apporte des clefs d’analyse de l’approche géostratégique. La présente synthèse s’articule en trois chapitres : l’invention de la géostratégie de l’Antiquité au XXe siècle ; la spécificité de la géostratégie contemporaine, en particulier à l’ère des guerres asymétriques ; la géostratégie au service de l’art militaire, dans un contexte de diversité des concepts et des représentations.
Tigrane Yégavian
Espionnage
Éric Denécé (dir.), Renseignement et espionnage pendant la Première Guerre mondiale, Ellipses, collection du Cf2R, 29,50€.
Quatrième tome d’une somme inédite en langue française sur l’histoire de l’espionnage en France et dans le monde, le présent ouvrage se focalise uniquement sur la période de la Première Guerre mondiale dans un contexte d’innovations techniques et industrielles. L’ampleur de l’affrontement, le gigantisme des armées, la diversité des théâtres d’opérations terrestres et maritimes ou encore les multiples progrès techniques. Tous ces éléments décuplent les besoins en informations des gouvernements et des états-majors. Aussi, les services de renseignement des puissances belligérantes vont connaitre un développement considérable à partir de 1914.
Mené d’une main de maître par Eric Denécé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement, l’ouvrage aborde une douzaine de thèmes. Parmi lesquels citons les appareils de renseignement français, britannique, allemand, italien, américain et turc, ainsi que ceux des pays neutres qui ne sont pas épargnés par la guerre. Mais aussi les grandes évolutions en matière de renseignement observées : développement des interceptions et de la cryptographie, du renseignement aérien et économique, institutionnalisation de la propagande et de l’action psychologique, rôle important joué par les femmes dans la guerre de l’ombre, etc. Ces nouveaux registres de la guerre n’ont cessé de voir leur rôle se renforcer depuis, jusqu’à occuper un rôle majeur dans les conflits modernes. Les auteurs dressent ainsi un tableau très riche du renseignement humain et technique et des opérations de subversion d’influence ou de sabotage au cours du conflit.
Tigrane Yégavian
Au séminaire
Bernard Pitaud, Saint-Sulpice et les séminaires sulpiciens au cœur de la crise moderniste 1900-1930, Salvator, 2023, 20€.
À l’aube du XXe siècle, la sécularisation et la déchristianisation du siècle précédent ont fait leurs preuves. Trois ans avant la séparation officielle des Églises et de l’État, les congrégations religieuses sont radiées du territoire français. Le séminaire de Saint-Sulpice et sa congrégation enseignante influent depuis plus de deux siècles en Europe, et choisissent de traverser cette crise sans abandonner leur mission. Ils optent pour l’adaptation au nouveau monde, à coups de contrats et de traditions. Dans ce sixième tome sur l’histoire des Sulpiciens, Bernard Pitaud s’appuie sur d’abondantes archives pour brosser le portrait de ces formateurs de futurs prêtres, à travers 30 ans d’une histoire tumultueuse et dense.
Henri IV
Flavie Leroux, La marquise de Verneuil, maîtresse d’Henri IV, Fayard, 2023, 23€.
Successeur de la fabuleuse Gabrielle d’Estrées aux côtés d’Henri IV, aujourd’hui presque inconnue, elle fut à son époque l’une des femmes les plus célèbres d’Europe. Flavie Leroux remet à l’honneur la marquise de Verneuil, légendaire maîtresse du Vert-Galant. Adulée par quelques-uns, discréditée par la majorité de ses contemporains, l’oubli en eut bientôt raison et sa notoriété fut vite estompée. Ce n’est qu’après l’assassinat du roi que le commun des mortels lui reconnut une certaine force d’âme. Le siècle d’Henri le Grand aurait-il été le même sans « la marquise » ? C’est la question à laquelle l’auteur tente de répondre dans cette biographie exceptionnelle, affrontant la légende noire, au prisme de trois facettes : maîtresse royale, criminelle de lèse-majesté et femme d’affaires.
Seconde Guerre mondiale
Ligne Maginot. T. 1 : La Bataille des Alpes, Plein Vent, 2023, 15,90€.
Les éditions Plein Vent sont de retour, et en beauté, avec cette histoire illustrée de la Ligne Maginot. Le premier tome se concentre sur la bataille des Alpes, seule victoire française face à l’invasion ennemie, épisode témoin de la résistance de la ligne Maginot, qui jamais ne céda. Les troupes de Mussolini sont en action face aux troupes françaises désorganisées, mais solides.
Les auteurs imaginent les aventures de trois jeunes gens de la région niçoise tentant de démêler des secrets familiaux sous l’Occupation, à une époque où la devise des soldats français est largement mise à l’honneur : « On ne passe pas ! ». Un récit richement documenté, jalonné de parallèles intéressants avec notre époque actuelle.
