Un sommet inédit entre le Royaume-Uni et l’UE: le premier depuis le Brexit

20 mai 2025

Temps de lecture : 3 minutes

Photo : Britain's Prime Minister Keir Starmer, center, stands for a photo with European Commission President Ursula von der Leyen and European Council President Antonio Costa, right, ahead of a United Kingdom and European Union summit at Lancaster House, London, Monday, May 19, 2025. (Henry Nicholls/Pool Photo via AP)/LBL105/25139352196757/POOL PHOTO/2505191205

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Un sommet inédit entre le Royaume-Uni et l’UE: le premier depuis le Brexit

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Ce lundi 19 mai s’est tenu un sommet inédit entre Londres et Bruxelles, le premier depuis le Brexit, visant notamment à établir un partenariat en matière de sécurité et défense. Cet événement reflète certainement un renouveau dans les relations entre l’UE et le Royaume Uni, qui s’étaient considérablement dégradées depuis 2020 suite à la sortie de Londres de l’Union.

L’aboutissement d’une volonté politique d’amenuir les conséquences du Brexit

Les élections législatives britanniques de juillet 2024, remportées par le Parti Travailliste, ont mené son chef, Keir Starmer, à la tête du gouvernement. Sa campagne s’était fondée, entre autres, sur une volonté de rapprochement étroit entre le Royaume-Uni et l’UE, en matière commerciale mais notamment dans le domaine sécuritaire, au regard d’une situation géopolitique mondiale dégradante. Le sommet n’a fait que concrétiser cette volonté politique.

Le Premier ministre britannique a donc accueilli à Lancaster  House, Ursula Von der Leyen, présidente de la Commission européenne et le président du Conseil européen, Antonio Costa. L’objectif affiché ? Solidifier les liens et relancer leurs relations diplomatiques et militaires, à travers un partenariat. L’accord de ce partenariat a donc été examiné par le COREPER, l’assemblée des ambassadeurs de l’UE, et a fait l’objet de négociations sur plusieurs semaines. L’aspiration de Keir Starmer est claire : « Nous conclurons un accord dans l’intérêt national », a-t-il affirmé sur X, afin de tourner la page d’années de tensions entre l’Union européenne et Londres.

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Le retour de la guerre en Europe et l’élection de Donald Trump : des facteurs de rapprochement

Si cette volonté d’entente entre Bruxelles et Londres s’est accentuée ces derniers mois, c’est bien en raison de l’investiture de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis. Cette dernière a marqué un changement de paradigme complet, entre une administration Biden engagée corps et âme dans la lutte contre la Russie, et une gouvernance républicaine, plus réticente à soutenir l’Ukraine. Une solution : renforcer la coopération européenne afin de s’indépendantiser de Washington. Ce sommet, et le rapprochement entre l’UE et le Royaume-Uni, n’en est qu’un outil.

Le partenariat en matière de sécurité et défense, négocié en moins de deux semaines, ouvre la voie à la participation britannique au mécanisme européen d’achats communs d’armement (SAFE). Ce programme, adopté dans le cadre du plan « Préparation 2030 » de l’UE, prévoit « une préférence européenne » en termes de production, d’investissements et d’échanges dans le domaine de l’armement. 65% des systèmes d’armes achetés doivent être fabriqués dans l’UE ou dans les pays tiers avec lesquels l’Union a conclu des accords. Les dispositions, excluaient jusqu’à alors le Royaume-Uni et les industries de défense britanniques.

Toutefois, ce pacte n’est qu’une première phase pour intégrer ce futur projet européen doté de 150 milliards d’euros. En effet, son inclusion dans le programme est conditionnée à la signature d’un nouvel accord, qui établirait précisément le montant de la participation financière de Londres au plan d’achats communs.

Ce nouveau pacte, inédit depuis 2020, vient finalement concrétiser la coopération de défense nouée depuis trois ans face à la Russie. En effet, le Royaume-Uni était l’un des premiers pays à former les soldats ukrainiens après l’invasion de l’armée moscovite. De plus, Keir Starmer avec Emmanuel Macron étaient les premiers à défendre le projet visant à établir une présence militaire occidentale en Ukraine après un éventuel cessez-le-feu.

L’aboutissement du partenariat devrait permettre à l’armée anglaise de rejoindre certaines missions militaires mais également à Londres de participer à des réunions ministérielles de l’UE. Le chef de gouvernement britannique salue ainsi « un nouveau partenariat stratégique avec l’Union européenne » qui ouvre indéniablement la page à un chapitre.

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Un retour en arrière du Brexit ?

La réunification de Londres avec Bruxelles est si frappante qu’elle pose une question inévitable : Le sommet marque-t-il les prémices d’une volonté de réintégrer à terme l’Union européenne ? En effet, ce sommet ne concerne pas uniquement la chose militaire. Il traite également de la question migratoire, du marché de l’électricité, d’accords de pêche, de la jeunesse…

Mais malgré cela, le gouvernement écarte la possibilité d’un retour sur le marché unique ou dans l’union douanière. Les négociateurs des partenariats stratégiques insistent sur le caractère équilibré des accords, qui aspirent à respecter les lignes rouges des conservateurs qui avaient engagé la sortie du Royaume-Uni de l’UE.  Effectivement , ce sommet est en sujet sensible en terre britannique, avec la montée en puissance du parti anti-immigration et conservateur, Reforme UK, dirigé par l’un des acteurs principaux du Brexit, Nigel Farage.

Dans tous les cas, cette rencontre demeure historique en ce qu’elle permet de renouer après des années de tensions entre les 27 de l’Union européenne et les gouvernements successifs anglais. La cheffe de l’exécutif européen, Ursula von Der Leyen, s’est exprimée à ce sujet, qualifiant cette rencontre « d’une vraie chance de tourner la page et d’écrire un nouveau chapitre dans notre relation ».

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