Blake et Mortimer sont de retour, dans une aventure très réussie, tant par le graphisme que par l’intrigue. Une mise en abîme des défis géopolitiques contemporains dans l’intemporalité des deux héros anglais.
Le dernier tome des aventures de Blake et Mortimer s’inscrit dans la grande tradition des récits où l’imaginaire sert de révélateur aux tensions géopolitiques contemporaines. En renouant avec l’héritage d’Edgar P. Jacobs, ce nouvel album propose une intrigue haletante qui, sous les atours de l’aventure scientifique, déploie une lecture subtile des rapports de puissance, des enjeux maritimes et des territoires fantasmés.

L’intérêt géopolitique du récit réside surtout dans sa capacité à faire de l’espace maritime un véritable personnage. Les abysses deviennent un terrain de confrontation où se rejouent la course aux ressources, la militarisation des océans et le spectre d’armes capables de modifier l’équilibre stratégique mondial. Le parallèle avec les tensions contemporaines — exploitation minière des fonds marins, câbles sous-marins, souverainetés contestées — est constant sans jamais être didactique.
Graphiquement, Peter Van Dongen et Yves Sente offrent une ligne claire somptueuse, précise et élégante, qui redonne à Blake et Mortimer leur souffle épique. L’atmosphère rétro-techno, les machines improbables, les cités englouties, composent un univers où le merveilleux scientifique éclaire les inquiétudes d’aujourd’hui.
La Menace atlante rappelle qu’une bonne bande dessinée d’aventures peut aussi être une excellente porte d’entrée à la géopolitique : elle montre comment les mythes structurent encore les stratégies des États, comment l’imaginaire des profondeurs nourrit les rivalités, et comment la science, loin d’être neutre, s’inscrit toujours dans un rapport de forces. Un album maîtrisé, riche et stimulant, qui confirme la force intemporelle de Blake et Mortimer.










