La guerre soudanaise déchire le pays depuis deux ans, sans solution de fin. Les violences se concentrent à Khartoum et au Darfour, créant une profonde crise humanitaire et sociale.
Le Soudan est marqué par une histoire tourmentée, dominée par des conflits internes, des luttes ethniques et des rivalités politiques. Depuis son indépendance en 1956, le pays a connu plusieurs guerres civiles, dont la plus récente, éclatée en avril 2023, oppose les Forces armées soudanaises (FAS) dirigées par le général Abdel Fattah al-Burhan aux Forces de soutien rapide (FSR) commandées par le général Mohamed Hamdan Dagalo, dit « Hemedti ». Ce conflit a plongé le pays dans une nouvelle spirale de violence, menaçant la stabilité régionale et provoquant une crise humanitaire majeure.
Un pays traversé par de nombreuses divisions
Le Soudan a longtemps été le théâtre de tensions entre le nord, majoritairement arabe et musulman, et le sud, à dominante chrétienne et animiste. Ces divisions ont nourri deux guerres civiles majeures : la première de 1955 à 1972, la seconde de 1983 à 2005. La signature de l’Accord de paix global en 2005 a ouvert la voie à l’indépendance du Soudan du Sud en 2011. Pourtant, cette partition n’a pas résolu les problèmes structurels du pays.
En 2019, après des mois de protestations populaires, le régime d’Omar el-Béchir, au pouvoir depuis 1989, est renversé par un coup d’État militaire. Un gouvernement de transition civilo-militaire est mis en place, avec la promesse d’aboutir à des élections démocratiques. Cependant, les tensions entre les composantes civiles et militaires du pouvoir explosent en octobre 2021, lorsque les militaires prennent de nouveau le contrôle. Ce coup d’État aggrave les divisions internes et précipite la rupture entre les deux principaux chefs militaires, Burhan et Hemedti, autrefois alliés.
Le déclenchement du conflit de 2023
Le 15 avril 2023, des combats éclatent à Khartoum entre les FAS et les FSR. Cette guerre éclate dans un contexte de désaccord profond sur l’intégration des FSR dans l’armée nationale, conformément à un accord de transition politique. Les FSR, forces paramilitaires créées sous Béchir et enrichies par les conflits au Darfour, refusent de se soumettre totalement au commandement militaire traditionnel. Hemedti, fort de son pouvoir économique et de ses alliances régionales, voit dans ce conflit l’opportunité d’imposer son leadership national.
Rapidement, les combats s’étendent à d’autres régions du pays, notamment au Darfour, au Kordofan et dans l’Est du Soudan.
Conséquences humanitaires désastreuses
Selon les Nations unies, le conflit a provoqué le déplacement de plus de 8 millions de personnes, dont environ 1,8 million ont fui vers les pays voisins (Tchad, Égypte, Soudan du Sud, Éthiopie). Les combats dans les zones urbaines ont transformé Khartoum et d’autres villes en champs de ruines. L’accès à l’eau, à la nourriture, aux soins médicaux et à l’électricité est fortement compromis.
Les organisations humanitaires font état de violations graves du droit international humanitaire : massacres de civils, violences sexuelles utilisées comme arme de guerre, enrôlement forcé de jeunes hommes.
Le Darfour, déjà traumatisé par la guerre et le génocide des années 2000, est de nouveau en proie à des violences ethniques d’une grande intensité. Des groupes armés affiliés aux FSR sont accusés de perpétrer des massacres contre les populations massalit et zaghawa, accusées de soutenir les FAS.
La cartographie des morts démontre que l’essentiel des victimes se font en zones urbaines (Khartoum et environ) et dans la région du Darfour, soit le sud du pays. Aucune solution ne semble trouvée pour l’instant et le pays s’enfonce dans une spirale sans fin.