Depuis 2017, les relations entre l’Ouzbékistan et l’Union européenne sont entrées dans une phase de croissance dynamique. Le programme de réformes du président Shavkat Mirziyoyev a jeté des bases solides pour une coopération approfondie et efficace avec l’UE. Aujourd’hui, Bruxelles considère de plus en plus l’Ouzbékistan comme un pays ayant un fort potentiel pour devenir un modèle de transformation durable en Asie centrale.
Shakhnoza Kodirova. Chef du département de l’Institut d’études stratégiques et régionales rattaché à la présidence de la République d’Ouzbékistan
Le partenariat a considérablement évolué depuis la signature du premier accord de partenariat et de coopération en 1996, s’étendant désormais à plus de 20 domaines, dont le commerce, l’énergie, l’éducation, la protection de l’environnement et le développement humain. Actuellement, les deux parties sont sur le point de finaliser un nouvel accord de partenariat et de coopération renforcé, qui élèvera leurs relations au rang de partenariat stratégique.
Le capital humain et l’éducation, piliers du partenariat entre l’UE et l’Ouzbékistan
L’un des éléments centraux du dialogue en constante évolution entre l’Ouzbékistan et l’UE est la coopération en matière de développement du capital humain. Pour l’UE, l’investissement dans l’éducation est la pierre angulaire d’une croissance économique durable, d’une gouvernance démocratique et d’une compétitivité mondiale. L’éducation et le développement des compétences font depuis longtemps partie intégrante de l’engagement extérieur de l’UE avec les pays partenaires.
L’Ouzbékistan, quant à lui, accorde une importance stratégique à l’amélioration des capacités de sa main-d’œuvre, qu’il considère comme un facteur clé du développement durable, de la modernisation économique et de la qualité de vie. Dans un contexte de réforme institutionnelle rapide et de transition vers une croissance inclusive, l’Ouzbékistan considère la coopération avec l’UE dans le domaine de l’éducation comme un mécanisme essentiel pour adopter les normes internationales, faire progresser la recherche et former une nouvelle génération de professionnels.
La stratégie actualisée de l’UE pour l’Asie centrale met particulièrement l’accent sur les partenariats pour le développement du capital humain. La conférence de Samarcande sur la connectivité entre l’UE et l’Asie centrale a servi de catalyseur pour faire progresser la coopération scientifique et éducative. Parmi d’autres initiatives, des plans sont en cours pour établir un nouveau cadre d’échanges scientifiques et technologiques dans des domaines prioritaires tels que l’intelligence artificielle, les mégadonnées, la numérisation et la recherche spatiale, des sujets qui ont occupé une place importante lors des récentes réunions de haut niveau entre les dirigeants de l’UE et de l’Ouzbékistan.
De Tempus à Erasmus+ : une progression continue
La coopération entre l’UE et l’Ouzbékistan dans le domaine de l’éducation a des racines profondes. Les premiers programmes tels que Tempus (1994-2013) et Erasmus Mundus (2007-2014) ont jeté les bases de la modernisation du paysage éducatif et de la recherche en Ouzbékistan. Ces initiatives étaient axées sur la reconversion du personnel universitaire, la modernisation des infrastructures techniques et la mise en relation de la recherche universitaire avec des applications concrètes.
Depuis 2015, Erasmus+ joue un rôle clé dans la transformation du système d’enseignement supérieur ouzbek. Actuellement, 98 universités ouzbèkes participent au programme, ce qui permet d’améliorer considérablement la qualité académique et l’internationalisation. De 2015 à 2024, Erasmus+ a financé 63 projets dans le cadre du volet « Renforcement des capacités dans l’enseignement supérieur ». Parmi ceux-ci, 43 ont été menés à bien, tandis que 20 sont en cours. Il convient de noter que sept projets sont coordonnés par les universités ouzbèkes elles-mêmes, ce qui reflète la maturité institutionnelle et le leadership croissants du secteur de l’enseignement supérieur dans le pays.
Grâce au volet « Mobilité internationale des crédits » du programme, plus de 3 000 étudiants et membres du personnel universitaire ouzbeks ont participé à des programmes d’échange. Entre 2021 et 2024, l’Ouzbékistan s’est imposé comme le leader régional en matière d’échanges universitaires, représentant 39 % de l’ensemble de la mobilité Erasmus+ en Asie centrale. À ce jour, 127 étudiants ouzbeks ont obtenu les prestigieuses bourses Erasmus Mundus pour poursuivre des études de master dans les meilleures universités européennes.
Renforcer les liens universitaires grâce à Horizon Europe et Jean Monnet
Dix-sept projets Jean Monnet sont actuellement mis en œuvre en Ouzbékistan. Ces initiatives contribuent à renforcer les liens universitaires avec l’UE, notamment grâce aux centres d’excellence hébergés par l’Université d’économie mondiale et de diplomatie et l’Université d’État d’économie de Tachkent. Ces centres promeuvent non seulement les normes éducatives européennes, mais favorisent également une nouvelle culture universitaire propice au dialogue ouvert et à la collaboration en matière de recherche.
L’adhésion de l’Ouzbékistan à Horizon Europe, le programme phare de l’UE en matière de recherche et d’innovation doté d’un budget de 95,5 milliards d’euros, a constitué une étape importante dans le partenariat entre l’UE et l’Ouzbékistan dans le domaine de la connaissance. Cette participation permet aux chercheurs et aux universités ouzbeks d’accéder à des subventions compétitives, à des projets de recherche communs et à des réseaux mondiaux de connaissances.
Le cluster 5 d’Horizon Europe, « Climat, énergie et mobilité », présente un intérêt particulier, car il correspond étroitement aux priorités nationales de l’Ouzbékistan en matière de développement économique vert et de résilience énergétique. Dans ce domaine, l’Ouzbékistan participe également à la SECCA (Sustainable Energy Connectivity in Central Asia), une initiative régionale visant à promouvoir l’intégration énergétique durable.
Conscient de la nécessité de sensibiliser le public à l’adaptation au changement climatique, l’Ouzbékistan a intégré les thèmes de la durabilité dans son programme national d’éducation. Le programme gouvernemental de transition vers une économie verte à l’horizon 2030 identifie l’éducation au développement durable comme une priorité absolue. Il vise à préparer une nouvelle génération de spécialistes capables de soutenir la croissance verte à l’ère des défis environnementaux mondiaux.
Les universités ouzbèkes ont déjà commencé à proposer des programmes dans des disciplines très demandées liées à l’économie verte, notamment la biotechnologie, l’ingénierie des énergies renouvelables et la gestion durable des ressources. Selon le ministère de l’Enseignement supérieur, des Sciences et de l’Innovation, plus de 35 % des étudiants de l’année universitaire 2023/2024 sont inscrits à des programmes liés aux compétences vertes, contre seulement 5 % en 2019/2020. Cette augmentation spectaculaire reflète l’engagement de l’Ouzbékistan à bâtir une économie fondée sur la connaissance, axée sur l’innovation et respectueuse de l’environnement.
Réforme de l’enseignement professionnel : l’expertise européenne à l’œuvre
La coopération entre l’UE et l’Ouzbékistan en matière de capital humain est tout aussi évidente dans la réforme de l’enseignement et de la formation professionnels. Les États membres de l’UE sont depuis longtemps des leaders mondiaux dans l’intégration de l’éducation aux besoins de l’industrie, un domaine qui présente un intérêt direct pour le programme de réforme national de l’Ouzbékistan.
Depuis 1995, la Fondation européenne pour la formation (ETF) aide l’Ouzbékistan à développer des systèmes d’éducation et de compétences modernes. L’objectif général est d’améliorer l’employabilité, d’élargir l’accès à l’apprentissage et de promouvoir la cohésion sociale.
Ce partenariat de longue date a servi de pont entre l’Ouzbékistan et les meilleures pratiques européennes en matière de formation professionnelle. Entre 2014 et 2020, l’ETF et la délégation de l’UE en Ouzbékistan ont mis en œuvre le projet « Développement des compétences pour l’employabilité dans les zones rurales » en coopération avec l’UNESCO, en mettant l’accent sur l’intégration du marché du travail dans les régions sous-développées.
L’ETF a également contribué à renforcer les liens entre les prestataires d’enseignement et le secteur privé grâce au « processus de Turin », un mécanisme clé de révision des politiques mené par l’UE pour l’EFP. En 2022, l’Ouzbékistan a rejoint DARYA (Dialogue et action pour une jeunesse ingénieuse en Asie centrale), un programme régional de l’UE mis en œuvre conjointement par l’ETF et l’UNICEF. Doté d’un budget de 10 millions d’euros et d’un calendrier s’étendant jusqu’en 2027, DARYA promeut l’emploi des jeunes et la formation professionnelle en favorisant le dialogue entre les gouvernements et les milieux d’affaires.
Les réformes de l’Ouzbékistan en matière de formation professionnelle ont pris de l’ampleur depuis 2017, avec une attention particulière accordée à l’introduction du modèle de formation en alternance, une approche largement utilisée en Allemagne qui combine l’enseignement théorique et l’expérience pratique en entreprise. Le cadre juridique de la formation en alternance est désormais en place et 50 % des établissements d’enseignement professionnel en Ouzbékistan ont adopté ce modèle dans au moins un programme.
Un modèle de partenariat constructif
Le partenariat entre l’UE et l’Ouzbékistan est aujourd’hui un exemple convaincant d’engagement constructif fondé sur la confiance mutuelle et des valeurs communes. Au-delà des réformes internes, il contribue à la résilience et à la stabilité de l’ensemble de la région d’Asie centrale.
Le rôle de l’UE dans la transformation de l’Ouzbékistan va bien au-delà de l’aide financière ou technique. Il représente un engagement stratégique à long terme en faveur de réformes globales fondées sur l’éducation, la science et le développement humain. L’un des principaux atouts de l’approche de l’UE réside dans la promotion d’une synergie entre les systèmes éducatifs et les marchés du travail, afin de garantir que le développement des compétences débouche directement sur des opportunités, l’inclusion et le progrès.










