Ormuz : la porte du pétrole

24 juillet 2025

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Ormuz : la porte du pétrole

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Le détroit d’Ormuz est une artère énergétique par où transitent plus de 20% du pétrole mondial

Point de passage incontournable pour les flux énergétiques mondiaux, le détroit d’Ormuz cristallise depuis des décennies les tensions géopolitiques du Golfe. Ce corridor maritime, large de seulement 53 kilomètres dans sa partie la plus étroite, voit transiter près d’un cinquième du pétrole mondial. Ce flux vital pour les économies asiatiques et européennes en fait un espace stratégique de première importance.

Un goulot d’étranglement énergétique mondial

Le détroit d’Ormuz relie le golfe Arabo-Persique à la mer d’Arabie, et par-delà, à l’océan Indien. Il sépare les côtes de l’Iran au nord et celles des Émirats arabes unis et du sultanat d’Oman au sud. C’est à travers lui que transitent quotidiennement entre 17 et 20 millions de barils de pétrole.

Le pétrole y circule à bord de supertankers qui acheminent la ressource vers l’Asie (Chine, Japon, Corée du Sud, Inde) mais aussi vers l’Europe. À cette manne s’ajoutent environ 30 % du commerce mondial de gaz naturel liquéfié, dont le Qatar est le premier fournisseur.

Un espace militarisé et sous haute tension

En raison de cette concentration de flux vitaux, le détroit d’Ormuz est aussi l’un des espaces maritimes les plus surveillés au monde. Plusieurs puissances y croisent leurs forces navales :

Les États-Unis, via la Cinquième Flotte basée à Bahreïn,

Le Royaume-Uni et la France, dans le cadre de coalitions de sécurité maritime,

L’Iran, qui contrôle la rive nord et affirme régulièrement sa capacité à « fermer » le détroit en cas de conflit,

Des puissances asiatiques, notamment la Chine, intéressées par la sécurisation de leurs approvisionnements.

Géopolitique du chantage énergétique

Le détroit d’Ormuz joue le rôle de levier stratégique pour Téhéran, qui menace régulièrement de le bloquer en cas d’agression ou de sanctions renforcées. Cette capacité de nuisance, bien qu’imparfaite, suffit à troubler l’ordre énergétique mondial.

En face, les monarchies du Golfe cherchent à contourner leur vulnérabilité :

Émirats arabes unis : construction de l’oléoduc Habshan-Fujairah, qui permet d’exporter une partie du brut sans passer par Ormuz.

Arabie Saoudite : réactivation partielle de l’oléoduc Est-Ouest traversant la péninsule.

Qatar : développement de sa flotte de méthaniers à long rayon d’action.

Mais ces alternatives restent limitées. La dépendance vis-à-vis d’Ormuz demeure structurelle, notamment pour les exportations de l’Irak et du Koweït.

Un espace stratégique dans une guerre des flux

Le détroit d’Ormuz ne se réduit pas à une artère énergétique. Il est l’un des théâtres privilégiés de la « guerre des flux », concept cher à la géopolitique contemporaine. Dans cette nouvelle conflictualité, contrôler les points de passage — les chokepoints — permet de dominer, bloquer, ou taxer les flux vitaux de l’adversaire sans confrontation directe.

En cela, Ormuz est un espace d’affrontement indirect entre :

Les États-Unis et leurs alliés du Golfe, soucieux de maintenir la libre circulation et la suprématie navale occidentale.

L’Iran, qui veut briser l’encerclement stratégique et affirmer sa souveraineté sur son flanc maritime.

La Chine, discrètement présente mais attentive à la sécurisation de ses chaînes d’approvisionnement, notamment via l’Initiative « Route de la soie maritime ».

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