Giorgia Meloni : premier bilan après deux ans à la tête de l’Italie

16 février 2025

Temps de lecture : 5 minutes

Photo : La Première ministre Giorgia Meloni lors du meeting électoral du parti FdI, 2024//SIPA_shutterstock41166584_000003

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Giorgia Meloni : premier bilan après deux ans à la tête de l’Italie

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Au pouvoir depuis octobre 2022, Giorgia Meloni a réussi à durer alors que l’Italie avait connu de nombreux changements de Premiers ministres. Après deux ans à la tête de l’Italie, premier bilan en matière économique et politique.

L’Italie a connu cinq Présidents du Conseil depuis 2015. Après deux ans et trois mois comme chef du gouvernement italien, Giorgia Meloni offre une certaine stabilité à l’Italie.

Dès son arrivée au pouvoir le 22 octobre 2022, Giorgia Meloni a promis un important changement dans la politique avec la volonté de redonner à l’Italie un rôle important en Europe et sur la scène internationale. Première femme à la tête du gouvernement dans l’histoire de l’Italie, Giorgia Meloni a su convaincre l’opinion publique par son engagement pour la défense des intérêts de la Nation, en affichant ses valeurs et ses ambitions sans jamais renier son passé. Après plusieurs années d’alternance entre gouvernements de droite et de gauche où l’Italie a eu du mal à retrouver une stabilité et surtout une trajectoire, Meloni a eu une attitude ferme et rassurante en annonçant des objectifs ambitieux en faveur de l’économie et des ménages. Dans une période assez complexe et instable, avec une succession de crises, entre la pandémie du Covid19, l’éclatement de la guerre russo-ukrainienne, l’explosion des coûts de l’énergie, la crise en Moyen-Orient l’inflation, elle a entamé différentes réformes.

Réformes fiscales et réduction des impôts

En décembre 2024, le Sénat italien a adopté le budget 2025 contenant des mesures chiffrées à 30 milliards d’euros, dont plus de la moitié sont des baisses d’impôts et de cotisations sociales pour les salaires annuels allant jusqu’à 40 000 euros. Une mesure qui s’appliquait auparavant aux revenus plafonnés à 35 000 euros. Par ailleurs, la fusion pérenne des deux premières tranches d’imposition permet aux revenus annuels jusqu’à 28 000 euros de bénéficier d’un taux réduit de 23 %, contre 25 % auparavant. Ces initiatives visent à soutenir le pouvoir d’achat des classes populaires et moyennes. Le texte introduit également des incitations pour les entreprises, notamment une baisse de l’impôt sur les sociétés, qui passe de 24 % à 20 %, à condition que 80 % des bénéfices soient réinvestis et de nouveaux salariés embauchés.

Énergie

Afin de réduire la dépendance au gaz russe, l’Italie a renforcé ses relations avec des pays fournisseurs alternatifs, comme l’Algérie, devenue le premier partenaire énergétique du pays, et d’autres producteurs, comme l’Égypte, l’Azerbaïdjan et le Qatar.

Entre autres, il y a le renforcement du gazoduc Transmed (Algérie-Italie) et le développement du corridor énergétique avec l’Azerbaïdjan à travers le gazoduc TAP (Trans Adriatic Pipeline). Un nouvel accord énergétique vient s’ajouter entre l’Italie, l’Albanie et les Émirats arabes unis pour construire une infrastructure permettant de produire et de transporter de l’énergie propre de l’Albanie vers l’Italie, via une liaison sous-marine. Il s’agit d’une infrastructure importante, car elle apportera davantage d’énergie renouvelable en Italie. La valeur de l’infrastructure sera d’environ un milliard d’euros et elle sera opérationnelle dans trois ans au maximum. Enfin, le gouvernement souhaite faire approuver le projet de loi sur le nucléaire en Italie en 2025 et la création d’une entreprise nucléaire nationale. L’objectif est de réduire la dépendance et également les coûts énergétiques qui ont un impact négatif sur la compétitivité des entreprises, mais aussi sur les ménages.

Déficit et dette publique

L’Italie a réduit son déficit public de 7,2% à 3,8% du PIB entre 2023 et 2024 et compte le ramener à 3,3 % du PIB en 2025, en réduisant la dépense publique et la cession de participation de l’État dans certaines grandes entreprises. En 2024, la dette est passée sous le niveau de 3 000 milliards d’euros.

Le Plan Mattei pour l’Afrique

Le Plan Mattei – cœur de la stratégie italienne pour l’Afrique – a été défini par Giorgia Meloni comme un modèle de coopération concrète et ambitieuse. L’objectif vise à promouvoir le rôle principal de l’Italie en Méditerranée. Il doit permettre la construction d’un « nouveau partenariat entre l’Italie et les États du continent africain » dans des domaines allant de la coopération au développement à l’exploitation des ressources naturelles et hydriques et énergie. Parmi les objectifs figure la lutte contre l’immigration clandestine.

Aides aux familles pour augmenter la natalité

Les montants de l’allocation unique ont été augmentés, avec des allocations pour les familles avec au moins trois enfants et un mois supplémentaire de congé parental payé à 80 % au lieu de 60 %. La mesure de cette année prévoit une prime de 1 000 euros pour les nouveau-nés pour les familles avec ISEE jusqu’à 40 000 euros. La gestation pour autrui (GPA), mieux connue sous le nom de maternité de substitution, est devenue un crime universel en Italie.

Immigration illégale

Les questions d’immigration ont sans aucun doute été un sujet clé de l’agenda politique du gouvernement Meloni.

Entre 2023 et 2024, une quarantaine de décrets gouvernementaux ont été publiés sur le sujet. De plus, il n’y a pas eu de sommet européen au cours duquel Giorgia Meloni n’a pas annoncé à l’avance qu’elle voulait parler de débarquement et de mesures de dissuasion. En outre, ce n’est pas seulement en Italie et pas seulement aujourd’hui que l’immigration et l’asile sont devenus des questions politiques saillantes, indépendamment de la consistance réelle des phénomènes. Et surtout, la défense affichée des frontières et l’hostilité envers ceux qui arrivent du Sud du monde ont ravivé le débat identitaire des forces politiques et des gouvernements souverainistes. Il suffit de penser à la campagne électorale de Donald Trump et à sa promesse de mettre en œuvre la plus grande expulsion de l’histoire, aux dépens des 11 millions d’immigrés illégaux vivant aux États-Unis, souvent depuis de nombreuses années.

Pour réduire les débarquements, le gouvernement a intensifié ses efforts pour externaliser les frontières. Les voyages répétés en Tunisie, ainsi que le refinancement des accords avec les Libyens, ont produit des résultats tangibles.

Selon les données fournies par le ministère de l’Intérieur, en 2022, les débarquements ont été de 105 131 ; en 2023 ils ont augmenté à 157 651 ; en 2024, les débarquements ont été de 66 317, soit une baisse de -57,9% par rapport à 2023 et de -36,9% par rapport à 2022.

Les migrants actuellement hébergés sur le territoire sont au nombre de 139 141, répartis en zones chaudes (0,3%), centres d’accueil (72,6%) et centres SAI (27,1%). Giorgia Meloni a également construit un centre de rétention en Albanie. Un dispositif qu’elle espère généraliser afin de mieux gérer le problème migratoire.

Les défis qui attendent Giorgia Meloni seront nombreux, tant au niveau national qu’international. La forte influence américaine de Donald Trump pourrait constituer une menace pour les intérêts de l’Europe. Trump a clairement indiqué quel son principal objectif politique sera de diviser l’Europe, l’affaiblir politiquement et économiquement, en traitant avec chaque pays individuellement en position de force.

L’Amérique de Trump ne veut plus d’alliés, mais des clients pour leurs entreprises. La Russie de Vladimir Poutine ambitionne de la diviser et de dicter ses conditions pour la paix en Ukraine, et Xi Jinping, qui poursuit la conquête de l’Europe et des marchés étrangers. L’Europe se trouve dans un état inquiétant sur le plan politique et économique. Et ceci est dû aux intérêts contradictoires des nations européennes qui minent la prise de décision et l’action.

C’est pourquoi, un renforcement de l’alliance avec la France et l’Allemagne, qui surmonte la barrière de l’affiliation politique, pour protéger davantage les intérêts des Européens, notamment sur les questions de souveraineté énergétique, technologique, sanitaire et militaire serait le meilleur choix. Dans ce scénario, une grande opportunité se présenterait face à Meloni : s’affirmer comme femme d’État capable de défendre avec ses partenaires, les valeurs, les intérêts et la souveraineté européenne.

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À propos de l’auteur
Edoardo Secchi

Edoardo Secchi

Entrepreneur, investisseur, conseilleur économique. Président fondateur d’Italy-France Group et fondateur du club Italie-France.

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