Après plusieurs tentatives infructueuses, Starship a réussi ses essais. Avec des lanceurs réutilisables, c’est la promesse d’un accès à l’espace à moindre coût qui s’ouvre pour les satellites.
Starship est le pari le plus ambitieux de SpaceX : un lanceur entièrement réutilisable, deux étages au méthalox (méthane liquide/oxygène liquide), pensé pour tout faire : mettre en orbite des charges très massives, déployer des constellations, ravitailler en orbite, et un jour ramener des astronautes sur la Lune puis viser Mars. SpaceX présente Starship comme le lanceur le plus puissant jamais développé, capable d’embarquer 150 t vers l’orbite basse en mode réutilisable.
Architecture et performances
Le système comprend :
Super Heavy (1er étage) : 121 m pour l’ensemble, diamètre 9 m ; booster équipé de 33 moteurs Raptor. Sa mission : fournir l’impulsion initiale, puis revenir se poser près de la tour de lancement pour être réutilisé.
Starship (2e étage/« vaisseau ») : 6 moteurs (3 Raptors « sea level » + 3 Raptor Vacuum) pour opérer dans l’espace, avec un grand bouclier thermique à tuiles pour la rentrée atmosphérique. Les deux étages utilisent le moteur Raptor, un cycle full-flow à combustion étagée, record de pression de chambre et optimisé pour le méthalox.
L’objectif central du programme est la réutilisation rapide : un booster attrapé par les « baguettes » de la tour (Mechazilla) et un vaisseau qui effectue une rentrée contrôlée style « belly flop » avant un retour au sol.
D’un développement heurté… à un cap franchi en 2025
Après des essais spectaculaires depuis 2023, Starship a alterné progrès et revers : en 2025, SpaceX a notamment réussi la manœuvre de « catch » du booster mais perdu l’étage supérieur lors de vols d’essai au printemps. La FAA a ensuite clos l’enquête sur l’échec du vol 9, ouvrant la voie à un nouveau tir.
Le 26 août 2025, le 10e vol d’essai marque un tournant : mise sur orbite, déploiement de huit charges factices façon « distributeur Pez », rentrée contrôlée et amerrissages du booster (golfe du Mexique) et du vaisseau (océan Indien). Le véhicule a volontairement volé avec des zones de tuiles manquantes pour tester la marge thermique ; malgré des dégâts visibles, les objectifs majeurs ont été atteints, selon SpaceX.
Pourquoi Starship change la donne
Coût par kilogramme : si la réutilisation devient routinière, Starship pourrait faire baisser les coûts au-delà de ce qu’a déjà permis Falcon 9, ouvrant des marchés de charges >100 t (télescopes géants, modules station spatiale, sondes lourdes).
Capacité orbitale : le déploiement de « mock satellites » lors du vol 10 illustre la promesse de lancements massifs de constellations avec un dispenser dédié.
Lunaire & au-delà : la variante Starship HLS est l’atterrisseur choisi par la NASA pour Artemis III ; à terme, le concept d’avion-citerne et de dépôt orbital est la brique nécessaire pour Mars.
Enjeux industriels et réglementaires
Starship vole aujourd’hui depuis Starbase (Texas), mais SpaceX pousse pour opérer aussi depuis la Floride. Ce plan suscite des frictions avec d’autres acteurs du « Space Coast », qui craignent des contraintes de sécurité et de bruit empiétant sur leurs propres créneaux de tir. Les autorités évaluent l’impact environnemental et l’usage des pas de tir.
Starship n’est pas encore « un service » : c’est un système en montée en maturité. Mais son 10e vol a levé des doutes clés et réinstalle l’idée qu’un lanceur 100 % réutilisable n’est plus théorique. S’il tient sa promesse, l’accès à l’espace pourrait entrer dans une ère d’abondance où l’on conçoit d’abord pour réutiliser.