Dans un discours devant ses partisans le samedi 22 février à Budapest, le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a annoncé son souhait d’inscrire dans la Loi fondamentale hongroise le droit à l’utilisation de l’argent liquide, selon lui en danger en raison des projets de monnaie numérique.
La coalition au pouvoir va ainsi s’inspirer d’une proposition émanant du parti nationaliste Mi Hazánk (Notre Patrie), situé à la droite du Fidesz-KDNP et au Parlement depuis 2022, pour « garantir la protection des citoyens contre les grands réseaux financiers et les banques ».
« Les cartes bancaires appartiennent aux banques, le liquide est à toi »
Le débat autour de la numérisation de la monnaie a éclaté au grand jour, en Hongrie comme dans d’autres pays de l’UE, au moment des confinements et de l’inquiétude d’une partie de la population quant à l’introduction d’un système de crédit social à la chinoise. Ainsi, la Hongrie est en passe de devenir un pays en pointe en matière de création d’un droit fondamental enrayant les projets de contrôle de la population par le traçage des transactions financières. C’était en somme le ton employé par Viktor Orbán dans son discours du 22 février lorsqu’il a déclaré que les Hongrois ne voulaient pas devenir « esclaves des banques ».
Des obstacles encore à lever
Aujourd’hui, l’utilisation de l’argent liquide peut entrainer des frais supplémentaires et les banques s’appliquent méthodiquement à empêcher son utilisation. En Hongrie, par exemple, les retraits bancaires sont soumis à des frais de retrait importants dépassant un certain montant mensuel, alors que, comme dans de nombreux autres pays, un nombre croissant d’agences ne gèrent plus d’argent liquide, et qu’il faut commander à l’avance des sommes à retirer à partir d’un plafond fixé de manière discrétionnaire par la banque. Lenteur, frais supplémentaires, incitation au sans contact dans les commerces, tout est fait pour que l’on se détourne de l’argent liquide.
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Le liquide est pourtant gage de liberté, et une simple modification constitutionnelle, si elle est un grand pas effectué dans la protection d’un droit qui devrait être fondamental dans toutes les démocraties modernes, ne suffira sans doute pas à inverser une tendance bien ancrée, non seulement économiquement mais aussi culturellement. C’est pourquoi, le gouvernement hongrois a aussi l’intention d’augmenter le nombre de distributeurs automatiques, notamment dans les petites communes, mais aussi de faire sauter la règle selon laquelle il devient payant de retirer de l’argent à partir d’un certain montant. Cette annonce démontre que le gouvernement hongrois a compris les liens existants entre monnaie liquide et indépendance politique et qu’il veut faire du libre usage de l’argent liquide un levier d’autonomie politique. Une mesure à mettre en parallèle avec celle de Giorgia Meloni qui a relevé de 2 000 à 5 000 euros le plafond du montant maximum pour les transactions en liquide. En France, ce plafond maximum est de 1 000 euros.