Partagé entre trois puissances, le Cachemire est une zone de guerre perpétuelle. Des rivalités qui menacent la stabilité régionale.
C’est l’histoire d’une région montagneuse, de trois empires et de rivalités séculaires. C’est l’histoire d’affrontements et de guerres, pour la possession de corridors, de lieux de passages et de symboles. À tous ceux qui pensent que les conflits n’existent pas, que la guerre est chose du passé, que les représentations ne structurent pas le monde, le Cachemire offre un démenti cinglant. Des frontières nées de la partition de l’Empire des Indes en 1947, des jeux de puissance, des intérêts politiques et voilà comment, depuis plus de quatre-vingt ans, le feu de la guerre brûle aux confins de l’Inde, du Pakistan et de la Chine.
Article paru dans le N59 Droite. La nouvelle internationale ?
Avant 1947, le Cachemire était un État princier autonome, sous suzeraineté britannique, dirigé par Hari Singh, un maharadja hindou, mais avec une population à majorité musulmane. Lors de la partition, Hari Sing a d’abord tenté de rester indépendant, mais a dû faire face aux soulèvements de tribus soutenues par le Pakistan. Pour éviter l’annexion de son territoire par Islamabad, il décida de rejoindre l’Union indienne, ce qui déclencha la première guerre (1947-1948). Le cessez-le-feu de 1949 laissa un Cachemire divisé entre Inde et Pakistan, chacun des deux États revendiquant sa souveraineté sur le reste du territoire.
À quoi s’ajoutent, sur la frontière chinoise, des territoires annexés par Pékin en 1962, lors de la guerre sino-indienne.
Le 15 juin 2020, un affrontement entre des patrouilles indiennes et chinoises le long de la frontière s’est soldé par la mort de 20 soldats côté indien et de près de 40 soldats côté chinois. Affrontement à main nue et à coups de bâtons et de barres de fer, pour défendre une ligne frontalière à flanc de montagne.
Entre l’Inde et le Pakistan, les tensions sont toujours aussi vives. L’attentat du 22 avril 2025 à Pahalgam, qui a causé la mort de 26 touristes, a provoqué le déclenchement de l’opération Sindoor, lutte armée entre les deux pays, avec drones et aviation de combat. Plusieurs raids indiens ont été lancés sur des bases militaires pakistanaises, ce qui a conduit à des représailles d’Islamabad. Plus de 70 morts ont été recensés et de nombreuses pertes militaires de chaque côté.
Le conflit n’est pas réglé pour autant. Il est, selon la terminologie officielle, « gelé », c’est-à-dire qu’il peut reprendre à tout moment. Ce qui signifie aussi qu’il est sans fin. Ni l’Inde ni le Pakistan, pour des questions de symboles et de représentations, ne peuvent lâcher leurs revendications territoriales. La guerre au Cachemire est d’abord une guerre interne, qui permet de souder les deux pays autour d’un nécessaire ennemi. La modernité des moyens techniques n’efface pas la nature de la guerre ni l’archaïsme des oppositions.