À la Fondation Louis Vuitton, David Hockey expose une rétrospective qui plonge dans sa vie de peintre où se mêlent portraits et paysages. Des décennies de peinture où se retrouvent ses classiques et ses nouveautés
David Hockney 25, du 9 avril au 31 août, fondation Louis Vuiton
Une cour dans une maison en Normandie, trois véhicules, du gravier, quelques arbres et des colombages. Une scène du quotidien, anodine et banale. À son chevalet, avec ses feutres et ses crayons, David Hockney en fait une suite de paysage, un puzzle de peinture, dont il sort l’essentiel : les traits, les couleurs, les perspectives et les regards. Dans la lignée des Constable et des Turner, Hockney s’impose comme l’un des grands peintres anglais du paysage, avec cette capacité de regarder, de voir, de dire l’essentiel.
L’histoire de la peinture est généralement divisée entre les portraitistes et les paysagistes, Hockney a réussi à être les deux. Des portraits sans paysage et des paysages sans portraits. Ou peut-être, plus simplement, des portraits de paysages.
Dans les années 1960, il a connu le succès avec ses peintures de piscine en Californie. Il aurait pu rester cela toute sa vie : un rocker qui connaît le succès à la vingtaine et qui joue jusqu’à la mort le même tube. Loin de là. Chaque décennie, David Hockney s’est renouvelé, tant dans ses sujets que dans ses techniques. Les tableaux du grand canyon sont impressionnants de perspectives, de couleurs et de sensations. Des grands canyons, il aurait là aussi pu en peindre jusqu’à la mort et devenir un paysagiste américain. Mais il est également passé à d’autres choses.
Hockney peint à l’huile, à l’acrylique, mais aussi avec des photographies, en réalisant les collages que tout étudiant à voulu faire après lui. Il crée avec des i Pad, en prenant des photos et en dessinant sur les images capturées. Il crée durant le confinement dans sa Normandie d’adoption, arrivant à trouver la création et la liberté dans la peinture qui donne l’espoir. Il aurait pu réaliser de belles peintures, idéales pour les illustrations et les magazines. Mais davantage que peindre les paysages, il les a créés. Création du grand canyon, création de la cour en Normandie, création d’un bosquet sur un chemin rural. Création de paysages à l’aide de toiles assemblées qui font de chaque toile une peinture en soi, mais qui, mises bout à bout, comme un puzzle, créent un paysage dont l’immensité oblige à le voir sur place.
C’est la grande réussite de l’exposition à la Fondation Louis Vuitton, qui permet d’appréhender l’œuvre de David Hockney grâce à une présentation chronologique, de ses premières œuvres d’étudiant jusqu’à ses réalisations contemporaines. On voit l’évolution du style, les recherches du peintre, les errements et les avancées.
Avec des salles thématiques, notamment sur les portraits, l’exposition met en valeur le dialogue d’Hockney avec les grands peintres qui l’ont précédé. Parce qu’aucune création ne débute de nulle part et que tout peintre qui crée s’est nourri de ses prédécesseurs. C’est en cela qu’Hockney est moderne : il associe l’intemporalité des choix des sujets, portraits et paysages, à l’histoire de la peinture et aux techniques les plus récentes, comme le traitement numérique.
La couleur et le trait
David Hockney est un maître de la couleur. Ses bleus de piscine et de ciels californiens, ses rouges et ocres de canyon, le violet et le vert des paysages en témoignent. Il faut oser représenter des routes en mauve et des troncs en parme. Des couleurs qu’ils exhibent jusque dans ses tenues faites de carreaux et de vif.
Mais Hockney est aussi un maître du trait. Régularité des carreaux des piscines et des tuiles, linéarité des façades des bâtiments, courbes des chemins et des paysages. Dans l’histoire de la peinture, il y a souvent des peintres de la couleur et des peintres du trait ; Hockney parvient à associer les deux. Comme l’usage de la perspective inversée, qui déstabilise et croise les regards, Hockney associe l’abstraction et le figuratif. Et en grand maître de la création, il ne reste jamais sur une idée acquise, mais sait s’adapter, évoluer, revoir ; tout en conservant un style propre qu’il s’est forgé au cours d’une année de vie de peinture.