Kazakhstan, le virage démocratique

12 juin 2023

Temps de lecture : 3 minutes
Photo : le président du Kazakhstan, Kassym-Jomart Tokayev, prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des chefs d'État de la CEI à Astana, au Kazakhstan. Le président du Tadjikistan, Emomali Rakhmon, est à gauche. Utilisation éditoriale uniquement, pas d'archivage, pas d'utilisation commerciale. Ramil Sitdikov / Sputnik//SPUTNIK_8294987_6349149292ec9/2210141321/Crédit:Ramil Sitdikov/SPUTNIK/SIPA/2210141332
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Kazakhstan, le virage démocratique

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Le Kazakhstan s’est engagé dans une série de réformes politiques et économiques qui visent à transformer le pays. Du renforcement du pouvoir du Parlement à une meilleure répartition des richesses, en passant par un plus grand rôle de l’Assemblée du Peuple du Kazakhstan, l’ambition est de faire du pays une puissance géopolitique régionale stable et indépendante.

Par François de Montmorillon.

1991. Alors que les anciennes républiques soviétiques européennes se précipitent vers l’indépendance – la Lituanie déclare la sienne dès le 11 mars 1990 – les pays d’Asie centrale se montrent beaucoup plus réticents à la dissolution de l’URSS. Parmi eux, le Kazakhstan, très dépendant économiquement de la Russie et composé d’une multitude de nationalités en cohabitation forcée, héritage de la sédentarisation des peuples nomades et des déportations de l’Union soviétique, est le dernier à déclarer son indépendance, le 16 décembre 1991. 

À l’époque, les experts, locaux comme internationaux, craignaient une implosion de ce nouvel Etat multi-ethnique, grand comme cinq fois la France. Mais le pays, en créant l’Assemblée du Peuple du Kazakhstan, une instance de dialogue composé des quelque 120 entités nationales qui peuplent son territoire, conserva son unité. 

Série de réformes politiques 

Les évènements de janvier 2022, nés d’une protestation face à la hausse du prix des hydrocarbures, puis instrumentalisés par des opposants politiques aux réformes, poussent le successeur de Noursoultan Nazarbaïev, Kassym-Jomart Tokaïev, à accélérer les réformes démocratiques en bouleversant ses priorités : alors que le gouvernement comptait prioriser le développement économique, il se heurte au pouvoir des oligarques nationaux et décide de mener les réformes politiques de front avec les réformes économiques.

Le 5 juin 2022, une réforme constitutionnelle est ainsi approuvée par plus de 77% des votants ; les modifications portent surtout sur les deux chambres du parlement et le système électoral.

La chambre basse, le Mazhilis, est désormais composé de 98 députés, au lieu de 107, et est élu sur un scrutin mixte : 70% à la proportionnelle, avec des listes qui doivent être composées de 30% de femmes, de jeunes ou d’handicapés, et 30% au scrutin majoritaire. Le seuil de représentativité passe de 7% à 5%. Mais l’effort porte surtout sur le pluralisme politique, avec une réforme des partis politiques, qui sont désormais six à siéger au Mazhilis.

Le Sénat, quant à lui, compte toujours cinquante membres, mais cinq sont désignés par l’Assemblée du Peuple du Kazakhstan. La grande majorité (40) est issue du vote des collectivités territoriales, dont le rôle se retrouve renforcé, l’exécutif national ne pouvant plus casser des décisions locales. Les maires et les présidents de régions – les akims– sont directement élus au suffrage universel. La chambre haute ne peut plus seule promulguer des lois, renforçant ainsi le Mazhilis et le parlementarisme.

Un Conseil Constitutionnel est créé, dont les membres sont nommés par le Parlement et par le Président, et un poste judiciaire de médiateur de la République est constitué.

Enfin, le Président de la République, auparavant élu pour un mandat de cinq ans renouvelable, a désormais un unique mandat de sept ans. Il ne peut être membre d’un parti politique, et sa famille ne peut occuper de responsabilités.

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À la suite de la réforme constitutionnelle, Kassym-Jomart Tokaïev démissionne, et est réélu le 20 novembre 2022 pour un dernier mandat présidentiel à une confortable majorité de plus de 80% des suffrages. Le Sénat, lui, est renouvelé en janvier 2023 et des élections législatives pour renouveler le Mazhilis se sont tenues le 19 mars dernier. Pour la première fois, six des sept partis qui se sont présentés font leur entrée au Parlement. Sept indépendants sont élus au scrutin majoritaire. Le parti au pouvoir depuis l’indépendance, Amanat, conserve une majorité absolue de 62 sièges. La plupart des postes gouvernementaux aux échelles locales et nationales, autrefois aux mains de fidèles de l’administration de l’ancien président Nazarbaïev, sont renouvelés.

Démocratisation en cours 

La réforme constitutionnelle de juin 2022 et les différentes élections qui ont suivi constituent les débuts prometteurs d’une démocratisation de la vie politique kazakhstanaise. Les citoyens de cette république d’Asie centrale sont toujours confrontés à des défis économiques majeurs – notamment un taux d’inflation avoisinant les 20%. Alors que le débat politique ne ressemble en rien à celui que nous connaissons en France, les différents partis politiques soutenant dans ses grandes lignes l’action du Président Tokaïev, l’objectif est désormais de parvenir à une meilleure répartition des richesses au sein de la population et à la naissance d’une conscience politique démocratique chez les citoyens. 

L’Assemblée du Peuple du Kazakhstan, modèle unique de dialogue interethnique, joue en cela un rôle essentiel pour pacifier les relations, faire participer la population à la vie politique locale grâce aux quelque quarante maisons du peuple sur le territoire et faire naître une conscience nationale kazakhstanaise- au-delà des ethnies kazakhs, russes, ukrainiennes, lituaniennes, allemandes ou encore Tatars- dans cet Etat qui assume sa diversité.

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