Mondes en guerre, forces spéciales, Guderian, École militaire. Sélection des livres de la semaine.
Histoire du 1er RPIMa, Lieutenant-Colonel Rémi Bernier, Éditions Mareuil, 22€
Le lieutenant-colonel Rémi Bernier, ancien du 1er RPIMa, brosse un portrait riche et inédit de ce régiment en retraçant son histoire complexe. Le 1er régiment de parachutistes d’infanterie de marine, créé le 1er novembre 1960, est le fruit d’un héritage double : celui des SAS français (Special Air Service), et celui des parachutistes coloniaux. Durant les quinze premières années de son existence, l’unité a été entièrement vouée à l’entraînement de ses nouvelles recrues en partance pour l’Afrique du Nord et l’Outre-mer. À partir des années 1970, le tournant vers la vocation spéciale ne s’opère pas sans heurts. Rémi Bernier explique avec justesse que sans la détermination d’officiers, sous-officiers et militaires du rang passionnés et pragmatiques, le 1er RPIMa aurait pu disparaître. Pourtant, aujourd’hui, le régiment dispose d’une renommée hors du commun : on le cite pour son professionnalisme et la richesse de ses opérations menées. Dans ce très bel ouvrage, l’auteur s’attache à faire connaître une pièce maîtresse des opérations spéciales, dont l’esprit de corps atypique continue d’offrir le goût de l’aventure et du risque aux parachutistes. Loin se cantonner à un lectorat familier, Histoire du 1er RPIMa s’adresse à tous, notamment aux jeunes qui développeraient un attrait pour l’unité au long de leur lecture, au point, peut-être, d’en rejoindre eux-mêmes les rangs.
Heinz Guderian. Le maître des panzers, Jean Lopez, Perrin, 26€
Heinz Guderian, incarnation du « général du diable » : cette figure clé de la Seconde Guerre mondiale demeure à ce jour une zone d’ombre. Ayant lui-même rédigé son autobiographie, dans laquelle il se présente comme un tacticien hors pair, un homme de trempe osant faire face à Hitler et le père incontesté des panzers, Guderian prend le soin de se montrer à son avantage. Alors qu’en est-il ? Qui était Heinz Guderian ? L’ouvrage du grand spécialiste Jean Lopez pour répondre à cette question se distingue des travaux précédents sur le général de l’armée de terre du IIIe Reich en portant l’accent sur une période plus longue et s’appuie sur de nouvelles sources – un corpus épistolaire qui retrace la correspondance entre Guderian et son épouse Margarete Goerner. De ce travail biographique consciencieux ressort une description bien plus juste : Heinz Guderian, bon tacticien, mais mauvais stratège ; dans la marche vers l’arme blindée, il est porté par un bouillonnement d’idées à l’échelle internationale, puis, commandant et symbole des Panzers, mais pas leur véritable « père », il fixe son nom au fronton des victoires militaires. Loin d’être apolitique, il épouse dès la fin de la Première Guerre mondiale les idées de la droite extrême, se laisse corrompre par Hitler, et fait preuve d’un égoïsme opérationnel hors du commun. Nazi convaincu, donc, il demeure pourtant vénéré, même par les Occidentaux, au point d’échapper sans encombre aux procès de Nuremberg. Ainsi l’œuvre de Jean Lopez a-t-elle pour ambition de lever le voile sur la vision fantasmée du général, à laquelle il a lui-même contribué.
L’école Militaire. Une histoire en cartes postales, Lionel Pétillon, Éditions Pierre de Taillac, 24€
Lionel Pétillon, à travers cet ouvrage agrémenté de clichés sépia, invite le lecteur à se familiariser avec l’École militaire, un site monumental de douze hectares au cœur du VIIe arrondissement. Loin d’être une institution engourdie et figée dans le temps, l’École fut un lieu empreint de dynamisme, qui abrite aujourd’hui l’enseignement militaire supérieur de nos armées, et qui continue de représenter une partie de l’identité parisienne. Créée par Louis XV dans un souci de répondre aux besoins de ses troupes, elle a formé des chefs et officiers maîtrisant le métier des armes et l’art du commandement, spécialisés à l’issue de leur apprentissage dans les différents corps de régiments : infanterie, cavalerie, artillerie ou la marine. L’École militaire est encore très active, et accueille en son sein des officiers et civils qui, grâce à un cursus de choix, s’insèrent dans les hautes sphères de l’État. Également centre de réflexion et de stratégie nécessaires aux armées pour appréhender les nouveaux conflits, elle a toutefois connu de nombreuses secousses, exploitées par l’auteur et illustrées par les cartes postales qui accompagnent le récit. Il convient alors de découvrir l’histoire et l’évolution de ce grand monument historique par une promenade au cœur de l’histoire et du patrimoine du VIIe arrondissement. Car l’école militaire, loin de ne représenter qu’un ensemble architectural prestigieux ni même un site formateur des élites militaires, est avant tout un témoin et un acteur de l’histoire militaire, l’histoire de Paris et l’histoire de la France.
Mondes en guerre. Tome I : De la préhistoire au Moyen-Âge, dirigé par Giusto Traina, Passés Composés, 18,90€
Ce premier tome d’une série d’ouvrages coédités avec le ministère des Armées s’attache à saisir le concept de conflit dès ses origines, et met l’accent sur une réalité : dans les sociétés prémodernes, la guerre est profondément enracinée dans les structures sociales et représente une norme. En exploitant l’étude des mondes en guerre, les auteurs relèvent que celle-ci n’est pas une histoire sans sujets, mais une histoire des sujets. Sans nier la pertinence de l’échelon national, elle n’en fait pas le mode exclusif de la conflictualité : remonter aux temps préhistoriques permet d’intégrer la variété des acteurs, modes et espaces qui ont structuré et l’ensemble des pratiques guerrières jusqu’à aujourd’hui. La montée progressive de violence entre les hommes s’ouvre au Néolithique, et se routinise peu à peu, donnant bientôt lieu à une véritable culture de la guerre. Celle-ci s’accompagne dès lors d’une technologie des conflits. Le tome I des Mondes en Guerre, après avoir amorcé avec les premières traces de guerre entre groupes humains, se penche ensuite sur l’étude des mondes méditerranéens, chinois et indiens, et s’achève sur les guerres médiévales, entre la guerre de Cent Ans et l’expansion mongole, en passant par les conquêtes de l’Islam. Un ouvrage qui livre une étude exhaustive des conflits historiques dans le monde et permet de mieux saisir à quel point la guerre est structurante des sociétés de tous les continents.