<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Saint-Michel d’Aiguilhe, le bijou du Velay #4

5 août 2023

Temps de lecture : 4 minutes
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Saint-Michel d’Aiguilhe, le bijou du Velay #4

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Du haut de son rocher, la chapelle Saint-Michel d’Aiguilhe surplombe la cathédrale Notre-Dame du Puy-en-Velay et offre une vue exceptionnelle sur la cité auvergnate.

Perchée au sommet d’une ancienne cheminée volcanique de 82 mètres de haut, l’église Saint-Michel est le point d’arrivée d’un escalier de 268 marches qui gravit l’éperon rocheux. Située au nord du Puy-en-Velay, rattachée à la petite bourgade d’Aiguilhe, cette chapelle est un fabuleux exemple de l’art roman et conserve dans ses murs des trésors inestimables.

L’histoire d’un joyau

Certains prétendent que la chapelle fut construite sur un ancien temple dédié à Mercure, lui-même bâti sur les vestiges d’un dolmen. Plusieurs archives arguent qu’avant la construction de la chapelle, le rocher fut escaladé par des hommes extrêmement agiles. Peut-être y avait-il au sommet une sorte de culte. Le folklore local raconte qu’une jeune fille, accusée d’inconduite, fut jetée du haut du rocher à titre de châtiment probatoire, mais en réchappa. En 961, l’évêque du Puy, Godelsalc, commande au doyen du chapitre de la cathédrale, Truannus, la construction d’une chapelle au sommet du rocher de Saint-Michel. Godelsalc est le tout premier pèlerin français à ouvrir la « Via Podiensis », la route partant du Puy-en-Velay jusqu’à Saint-Jacques-de-Compostelle vers 950. Immédiatement, la chapelle consacrée à l’archange Saint-Michel dépend du chapitre de la cathédrale, notamment pour le matériel et les revenus, ainsi que pour le service liturgique, et ce jusqu’à la Révolution française. L’édifice étant considéré comme l’une des étapes privilégiées sur la route conduisant à la cathédrale du Puy, certains pèlerins célèbres gravissent le rocher, tels que Charles VII, Louis XI ou encore Charles VIII. Il semble également que quelques ermites aient occupé les grottes creusées dans l’éperon. 

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La figure de Saint-Michel joue un rôle fondamental à l’époque romane : il est l’archange placé au-dessus de Notre-Dame et le protecteur des portes. En 1245, la foudre frappe violemment le clocher, qui est reconstruit à l’identique au XIVe siècle. De même, en 1562, les huguenots détruisent la statue de Saint-Michel. La chapelle n’étant pas une paroisse, elle est abandonnée durant la Révolution française. Son existence menacée, Prosper Mérimée vole à son secours et demande la réhabilitation de « cette espèce de bijou d’architecture ». Et en 1955, lors de travaux de réhabilitation du chœur, un trésor d’une insigne richesse historique est découvert sous l’autel. Constitué de vénérables objets, sûrement placés là lors de la consécration au Xe siècle, il comprend un Christ polychrome en bois d’olivier, une croix pectorale en argent, une urne reliquaire, ainsi que des tissus recouvrant un coffret en ivoire.

L’architecture d’un bijou

D’inspiration romaine, l’oratoire primitif se limite au chœur actuel. Les peintures dont il est orné sont contemporaines à sa construction, et constituent ainsi un rare ensemble de peintures préromanes. On reconnaît, assez difficilement, le cortège des rois mages. Au Xe siècle, l’édifice est agrandi par un clocher à l’ouest, reproduit sur le modèle de celui de la cathédrale du Puy.

L’arc polylobé du portail.

Face à l’afflux de pèlerins, le chœur est lui-même englobé dans une bâtisse plus spacieuse au XIIe siècle. On y ajoute une nef, une tribune, ainsi qu’une façade polychrome et trilobée. Les agrandissements sont effectués sans aucune fondation. Trois oratoires, aujourd’hui vestiges, émaillent alors l’escalier d’accès, les deux premiers dédiés aux archanges Saint Raphaël et Saint Gabriel, et le troisième à Saint Guinefort, un lévrier sanctifié, protecteur des enfants, dont le culte fut pourtant condamné par le Concile de Trente. Un chien est d’ailleurs évoqué dans les sculptures du portail, orné d’un arc polylobé d’influence mozarabe.

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Au XIXe siècle, Prosper Mérimée propose le nettoyage des badigeons qui couvrent les fresques de la chapelle. Le travail est confié au peintre restaurateur Anatole Dauvergne. La façade est alors faite d’une mosaïque de pierres noires, grises, rouges et blanches. Le haut est conservé tel quel depuis le XIIe siècle. Sur le fronton, Saint-Jean, la Vierge Marie, le Christ, Saint-Michel, Saint-Pierre ont été taillés. Cet ensemble fait de la façade de la chapelle d’Aiguilhe la plus vaste façade sculptée du Velay. La mosaïque de pierre polychrome est tout à fait caractéristique de l’art roman auvergnat. La cathédrale du Puy et l’abside de l’église Saint Austremoine à Issoire en sont de parfaits exemples. Les sculptures en bas-relief du fronton et celles des chapiteaux sont parfois difficilement compréhensibles ; les trente-deux chapiteaux romans qui jalonnent la nef sont hétérogènes. Certains portent des palmettes, d’autres des végétaux, d’autres encore sont plus ouvragés. Ils portent tous des traces de polychromie, et l’humidité laisse entrevoir des motifs non finis, cachés par la couleur. 

Un ornement qui devait sans aucun doute s’accorder harmonieusement avec les figures peintes sur la voûte du chœur, évoquant le jugement dernier :  le tétramorphe, l’archange et la Jérusalem céleste.

Jérusalem céleste, angle du chœur.

Enfin, le chemin de ronde cernant la chapelle offre une jolie vue sur la ville du Puy, sur la cathédrale Notre-Dame ainsi que sur les vieux ponts à redents franchissant la Borne. De nos jours, l’histoire de ce lieu mystérieux est sublimée par un spectacle nocturne, « Puy de lumière ».

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